Avant-hier
De la naissance du Sahara aux premiers hommes ...venez comprendre la richesse archéologique de cette région.
Si le Sahara nous apparaît aujourd'hui comme une terre qui a toujours été désolée et inhospitalière, cela n'a pas toujours été le cas dans l'histoire de la dérive des continents. Avant que notre désert n'occupe sa position actuelle, le Sahara a subi d'importantes évolutions sur des millions d'années, et son aridité ne serait apparue que ces derniers millénaires, façonnant ainsi son environnement et ses peuplements humains, affirmant son caractère majestueux.
Le désert du Sahara est le résultat de hautes pressions atmosphériques (anticyclone) au niveau du tropique du Cancer, qui entraînent la descente d'air ascendant provenant de l'équateur, où il s'est élevé et asséché. Lors de sa descente, cet air s'assèche davantage et se réchauffe, contribuant ainsi à façonner l'environnement sec et chaud du Sahara. Ces hautes pressions sont également influencées par les deux calottes glaciaires qui affectent la position des anticyclones et donc du Sahara, actuellement situé dans la partie nord du continent africain (Rognon 1985).
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Les populations humaines tout autour de la falaise de Tiguidit connaissent bien leur territoire, elles connaissent chaque kori, chaque pâturage, chaque relief. Elles savaient depuis longtemps qu’à des endroits très particuliers dans des argiles, il y a des ossements géants qu'ils ne reconnaissent pas dans la nature actuelle. Chudeau, un géologue en tournée au sud de Marandet, est le premier en 1907 à identifier ces ossements comme ceux de dinosaures.
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La plaine de l’Ighazer se situe à la limite entre Sahara et Sahel. Au nord, se dessinent les massifs du Sahara central, Hoggar et Ajjer en particulier, dénommés bouclier Touareg. À l’est le désert du Ténéré, qui appartient au bassin du Lac Tchad, est séparé par la montagne bleue, l’Aïr, dont la partie orientale marque la séparation entre les deux grands bassins hydrographiques du lac Tchad et du fleuve Niger. A l’ouest et au sud enfin, s’étendent les plaines de I'Azawagh et du Damergou qui couvrent le bassin des Ouelleminden.
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La plaine de l’Ighazer se trouve dans l’aire septentrionale du bassin des Ouelleminden, formant le sous-bassin sédimentaire de la plaine de l’Ighazer - ou bassin du Timersoï -, encadré par les premiers contreforts du massif de l’Aïr à l’est, par le massif de l’Ahaggar au nord et par le Ténéré du Tamesna et la vallée de l’Azawagh à l’ouest. Au sud, à partir des falaises de Tiguidit, s’étend la Tadarast avec les formations gréseuses du Tegama.ma.
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L'Afrique est le berceau de l'humanité, car on y a retrouvé les plus anciennes traces d'homme, notamment dans le rift d'Afrique de l'est à l'époque quaternaire (Pléistocène). Mais en ce début de XXIè siècle, il apparaît que ce berceau se serait déplacé vers le Sahara et le bassin du lac Tchad en particulier avec la découverte de Toumaï. Comme le disait l'Abbé Breuil, "le berceau du monde est à roulette" (cité par Pales 1962), pour signifier que les recherches fourniraient de nouveaux éléments propres à repositionner encore ce berceau.
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Entre le Moustérien-Atérien au débitage Levallois et l’épipaléolithique, une industrie sur lames et lamelles, on observe un hiatus de l’occupation humaine au Sahara (Camps 1974). C’est pour le bassin du Lac Tchad le désert Kanémien, l’Ogolien pour l’Afrique occidentale, l’Ighazer se trouvant à l’interface de ces deux espaces temps climatiques, mais n’échappant pas pour autant à son aridité. Les populations se sont alors réfugiées sur les marges méridionales et septentrionales de ce désert, autour de la vallée du Nil, auprès des mares ou des lacs persistants et dans des climats plus cléments en altitude. Le Kanémien s’achèvera par une première phase « humide » datée de 13 000 à 12 500 BP. L'aridité est ensuite revenue durant environ 2 millénaires, entrecoupée par quelques brèves phases humides (Maley 2004).
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Le Néolithique débute il y a 10 000 ans, et se traduit notamment par le début de la sédentarisation des populations, qui s'accompagne en général de la domestication des animaux et des plantes, ainsi que de la fabrication de poteries destinées à des usages domestiques. Mais cette définition du néolithique est à géométrie variableselon les auteurs et les situations géographiques, comme en témoigne l'Histoire générale de l'Afrique publiée par l'Unesco en avril 1980, où presque chaque auteur à sa définition propre (Cornevin 1982). Si le processus de Néolithisation diffère d’une région à l’autre ou d’un groupement humain à l’autre, il faut bien se dire que les recherches différentielles ne facilitent pas toujours la compréhension globale des systèmes. Deux courants de pensée prédominent, l’un donnant la primauté à la culture matérielle, l’autre à l’ensemble des activités économiques (Huysecom 2020). Depuis le début du XXè siècle, « on peut dire que la néolithisation, dont la monogénèse moyenne-orientale et le strict diffusionnisme qui lui est conséquent, sont deux concepts qui s'effritent au fur et à mesure des découvertes archéologiques » (Amrane 2002).
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Au Sahara, l’art rupestre peut se subdiviser en différents groupes ou styles, néanmoins il ne faut pas voir ces styles se suivre les uns à la suite des autres, mais les imaginer fluctuants dans le temps et l'espace et pouvant même cohabiter. La difficulté de datation de ces gravures et peintures ne peut qu'inciter à beaucoup de prudence pour une chronologie des différents styles sahariens, mais les recherches de ces deux dernières décennies permettent de poser des jalons très appréciables.
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Les monuments et nécropoles funéraires regroupent toutes les structures funéraires en pierre sèche ou en terre ayant servi de sépultures et contenant en sus des ossements d’animaux, un mobilier funéraire ou tout autre objet lié aux rites d’inhumation. En Aïr et Ighazer, le mobilier funéraire est très peu présent, la sépulture contient le plus souvent un corps humain, mais on doit noter dans notre zone de travail que les premiers être inhumés sous des structures lithiques furent plus sûrement des bovins comme à Adrar Bous (Le Quellec 2014).
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L'industrie métallique va matérialiser l'entrée de la plaine de l'Ighazer dans l'Histoire. Néanmoins, ce passage s'étalera sur près de 2 millénaires, car les débuts de la métallurgie n'éteindront pas l'usage des outils lithiques aussi facilement. On peut même dire que ces nouvelles technologies ne changeront pas le quotidien des populations vers un mode de vie de plus en plus nomade, mais sans doute aussi de plus en plus hiérarchisé. Les métaux ont d’abord été transformé pour des petits objets de parures, de prestige voir de symbole de pouvoir pour afficher une position sociale, plutôt que des objets utilitaires destinés aux activités productives (Holl 2020). Cette période marque également le renforcement de l’influence saharienne et protoberbères sur la région de l’Ighazer, même si dans les montagnes de l'Aïr des "réfugiés climatiques" ont pu se maintenir encore quelques siècles non sans faire évoluer leur mode de vie.
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Après le Younger Dryas, les conditions sont devenues plus humides. Le désert du Sahara avait pratiquement disparu sous un mélange de types de végétation semi-aride et saisonnière, avec un maximum de précipitations et de déversement d'eau douce par le Nil entre 9 000 et 8 000 ans (Mutri 2014). Ces périodes humides, même inconstantes et disparates dans le temps et l’espace vont permettre la création d’établissements humains sur presque tous les milieux. En bordure de lac à Gobero et Tchin Tafidet, en plaine à Arlit ou en montagne à Iwelen.
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A partir de 3500 BCE, dans un contexte d’aridité croissante, les zones sahariennes sont progressivement abandonnées par les pasteurs pour d'autres régions plus au sud, désormais propices à l'élevage (Ozainne et al. 2014). La mouche tsé-tsé recule et ouvre ainsi les plaines sahéliennes aux pasteurs nomades. Les données actuelles dressant l’arbre phylogénétique du Pennisetum (aujourd’hui rattachée au genre Cenchrus) font remonter au IVè millénaire avant notre ère les premières opérations agricoles menées sur cette graminée, quelque part au nord de la boucle du Niger. Pour certains, aucunes données archéologique n’abonde en faveur d’une céréaliculture avant le IIIè millénaire BCE (Dupuy 2014). Le mil semble bien avoir été la première graminée africaine domestiquée entre la moyenne vallée du Sénégal et la moyenne vallée du Niger, se répandant en quelques siècles dans toute la bande saharo-sahélienne du bassin du fleuve Sénégal au bassin du lac Tchad (Dupuy 2014).
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Au Sahara central, les premiers Berbères apparaissent dès le Néolithique, on les appelle les Protoberbères bovidiens et leurs premières traces se manifestent dès le VIè millénaire avant notre ère. Ils vont évoluer en population que l’on désigne sous le nom de Paléoberbères", dont les Libyens et Garamantes de l’Antiquité en sont les représentants. Ils vivent à l’interface entre le monde méditerranéen et le monde soudanais, non pas de l’autre côté du Sahara, mais qui au début de l’antiquité occupent l’ensemble du Sahara central.
L’épopée garamante peut se définir en deux périodes. La première, dite période proto-urbaine Garamante de 500 à 0 BCE, fonde l’économie des garamantes. A la fin de cette période, les garamantes feront une tumultueuse rencontre avec l’empire Romain. La seconde période, ou période classique de 0 à 400 CE, sera une période faste commercialement, aux côtés de l’empire Romain, et jouant un rôle de plaque tournante du commerce transsaharien. Le royaume Garamante, premier État saharien, déclinera par la suite et son peuple se dispersera avant l’arrivée de l’Islam au VIIè siècle de notre ère.
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Les Gétules vont occuper une place tout aussi importante que les garamantes dans l’histoire des populations de l’Ighazer. Gabriel Camps en fera des Sanhadja (Camps 1987) dont certaines factions, comme les Messufa, seront à l’origine du premier royaume de notre plaine. Les Gétules sont des populations qui sont disséminées depuis la Syrte-Tripolitaine jusqu’aux rivages de l’atlantique sur une bande géographiquement hétérogène. Ils y occupent le plus souvent les hauts plateaux peu arrosés par un climat pré-désertique, restant pour une partie très en marge des autres populations notamment la Numidie et la Maurétanie (Desanges 1998). Le territoire Gétules englobait une partie du désert saharien, la lisière nord du Sahara (Gsell cité par (Gascou 1970), c’est bien entendu cette frange méridionale de la Gétulie qui nous intéresse et particulièrement sa partie occidentale.
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De tous temps, il y a eu des échanges à travers le Sahara. Mais c'est sans doute à partir de la période antique que les voies transsahariennes se matérialisent le plus, pas seulement géographiquement, mais aussi mentalement dans les imaginaires des aventuriers qui peuvent trouver leur traduction dans le voyage de ces jeunes nasamons à travers le Sahara, relaté par Hérodote dans la première moitié du premier millénaire avant notre ère (Larcher 1850). Même si tout chemin peut être une voie de diffusion culturel, ce ne sont sans doute pas encore des routes commerciales proprement dites, mais plutôt des itinéraires de cabotage plus ou moins réguliers selon les périodes. Le royaume des Garamante fut un pole à partir duquel il est possible de tracer ces itinéraires à travers le Sahara pour atteindre le Sahel. Il faut bien préciser que les auteurs gréco-romains ne semblent pas connaître l’Afrique occidentale, leurs connaissance s’arrêtant à la région d’Agadir dans l’actuel Maroc.
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Le palmier dattier et le dromadaire cohabitent parfaitement dans leur milieu écologique saharien et on peut même suggérer qu’ils ont été introduits en Afrique de manière assez similaire et à des époque tout aussi similaires. Ils sont aussi deux des piliers qui permettent la vie nomade au Sahara. Les rares fossiles de dromadaire sur des gisements holocènes du Maghreb dont nous disposons, n’apportent pas aujourd’hui d’argument suffisant pour témoigner de la présence du camelus dromedarius au Sahara avant l’âge historique (Camps et al. 1996).
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La tête au soleil les pieds dans l'eau, ce n'est pas seulement nos vacances, c'est aussi le milieu de prédilection des dattiers. Son origine Persane en fait un arbre étroitement lié aux religions monothéistes. L’arbre roi du désert dont l’homme admet qu’il a une origine divine particulière, puisqu’Allah le tira des débris d’argile dont il venait de modeler Adam, donnant ainsi au dattier une place prééminente dans la Création (Camps 1995). Cette espèce emblématique revêt une grande importance économique, symbolique et sociale dans toute son aire de culture traditionnelle, du Maroc à l'ouest, au plateau iranien à l'est. Son fruit sucré, la datte, est consommé depuis des millénaires et a servi d'aliment de base à l'agriculture de subsistance et comme source de prospérité économique, remontant aux premières civilisations du Moyen-Orient (Gros-Balthazard et Flowers 2020). Les principales régions de production sont le sud de l’Irak et le Bas Sahara algéro-tunisien.
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