Le premier explorateur à fouler le sol d'Aïr est Henrich Barth en 1853. Lors de son "excursion à Agadez", il en décrira l'Emghedeshie, langue à base Songhaï intégrant un vocable Tamasheq et Arabe, et précisera pour ce qui concerne la plaine de l'Ighazer l'implantation des villages d'In Gall et de Tegidda (Barth 1863), qu'il confond d’ailleurs avec la Takadda d'Ibn Battûta. En 1876, Erwin de Bary pénétra aussi l'Aïr mais ne put jamais le traverser entièrement, il décédera à Ghât peu avant une deuxième tentative. Plus tard en 1870, Nachtigal descendit de Mourzouk pour se rendre au Tchad, en passant par Bilma et N’Guigmi. Enfin, plus au sud de l’Ayar en 1891-1892, le Lieutenant-Colonel Monteil traversa le Niger à Say, alla jusqu’à Bilma par Sokoto, Kano, N’Guigmi, rentrant ensuite en France par Mourzouk et Tripoli (Commissariat de l’AOF 1922).
La première mission d'envergure qui parcourue l'Aïr fut celle de Foureau et Lamy de 1898 à 1900. Si les 1000 chameaux de la mission ne traverseront pas l'Ighazer (seuls 2 arrivent sur Agadez !), elle fit un séjour de 80 jours à Agadez, près du puits de Tansamane, pendant la saison pluvieuse, obligée d'user de menaces pour acquérir les chameaux dont elle avait besoin pour poursuivre sa route, le Sultan ne se montrant guère coopératif vis à vis de l'envahisseur qui ne disait pas encore son nom. Ce seront les Kel Owey qui finalement vendront leurs chameaux à la mission Foureau - Lamy. La mission notera que le Sultan ne jouit d'aucune autorité en son royaume, aux mains des factions touaregs les plus fortes, Kel Owey et Kel Ferwan. Il est alors élu par des Kel Gress, les 2 (!) Anastafidet et d'autres notables Kel Owey. Le départ de la mission se fera le 10 août en direction de Irahyen au sud de la falaise de Tiguidit, zone avec fort peu de puits, elle risquera ici le plus grand danger de son périple par manque d'eau, très vraisemblablement à cause de leur guide qui a voulu les égarer et finie donc par retourner tant bien que mal sur Agadez. Elle quittera la ville en octobre, après avoir été complètement ravitaillée en chameaux et nourritures à la suite de longues tergiversations des autorités locales, passant par le puits d'Aballema au sud des falaises pour rejoindre Zinder. Les cartes produites mentionneront une erreur manifeste qui arrondit les falaises de Tiguidit et l’oued de l’Ighazer wan Agadez vers le sud-ouest alors qu'il fallait indiquer le nord-ouest (Foureau 1902).
Si les explorateurs pénétrèrent l'Aïr par le Nord, les militaires français allaient s'appuyer sur les territoires du sud du Niger pour mener leur colonisation, en particulier par le Damergou au nord de Zinder, réserve céréalière des Touaregs de l'Aïr, et par l'ouest à partir de Tahoua, alors ville étape de la voie de ravitaillement de Zinder, l'Ader faisant partie de la Nigéria. Cette dernière région sera finalement rattachée au Territoire du Niger en 1907. Le Damergou est alors détenu par les Kel Imuzureg qui font payer un lourd tribut aux Kel Owey qui organisent la Taghlamt de Sokoto à l'Aïr puis de l'Aïr vers les oasis de Bilma. En 1900, après une lourde défaite, les Kel Owey s'allient aux français pour vaincre les Kel Imuzureg qui se réfugient à l'est dans le Koutous et l'Alakos. Ainsi, les Kel Owey maîtrisent-ils la presque totalité du parcours de la grande caravane qui ravitaille l'Aïr et pousseront les français à poursuivre leurs opérations de polices sur tout le grand parcours de la Taghlamt pour décourager les rezzous des Touareg et autres Toubou.
La situation commerciale
Aux dires du Lieutenant Jean, la voie quasi unique du commerce transsaharien au début du XXè siècle est celle qui relie Tripoli à Kano (Jean 1909). Les produits qui y circulent sont essentiellement italiens et anglais, et bien entendu les colonisateurs français imaginent changer cette état de fait. La France freina quelques-uns des grands courants d’échanges transsahariens pour détourner une partie des flux habituellement dirigés vers la Libye au profit de l’Algérie, également sous sa tutelle (Grégoire 2000). Les villes intermédiaires entre Agadez et Tripoli sont Ghât et Mourzouq, et dans une moindre mesure Ghadamès. Par le sud, la liaison à Kano se fait en ligne droite à travers Damergou et Damagaram pour atteindre la cité Hausa désormais nigériane. Agadès devint alors une garnison militaire qui fut vite une petite place marchande, un marché plus régulièrement approvisionné de part la présence du camp militaire.
Une autre liaison active est celle qui relie le Kawar à l’Aïr puis au Damagaram, c’est la Taghlamt, la caravane commerciale historique qui va chercher les dattes et le sel pour les échanger avec les céréales, les tissus et autres pacotilles du sud. Elle est évidemment d’une importance capitale pour les Touareg de l’Aïr, qui ramènent ainsi dans les montagnes les céréales nécessaires à leur alimentation. Au delà de l’échange commercial, c’est bien la fonction de transport qui est la plus rémunératrice, à tel point que les Touareg restent dans le sud lors des récoltes pour aider les paysans à accomplir toutes les tâches de la récolte de mil.
Les lignes commerciales vers le Touat sont encore actives mais peu fréquentées. On se rappelle qu’elle fonctionnaient surtout pour relier le lac Tchad quelques siècles auparavant. De même les voies commerciales vers la boucle du Niger semblent des plus moribondes, celles-ci aussi fonctionnaient surtout pour la liaison d’avec l’Égypte, étape obligée pour le pèlerinage à la Mecque. En somme, depuis quelques siècles le commerce s’est fortement infléchi sur un axe nord-sud au détriment des voies est-ouest. Enfin, on notera la relation commerciale importante qui existe entre l'Ighazer et le Gober, relation historique qui se renforce notamment avec les Kel Gress qui assurent aussi le commerce du sel de Tegidda n’Tesemt (Fonferrier 1923), tout en profitant de faire leur cure salée. Cette relation est évidemment bien plus ancienne, compte tenu que les populations de l’Ader et du Gober sont en partie originaires et parfois sous tutelle de l’Ayar, depuis au moins la fin du premier millénaire de notre ère.
Le début des années 20 verra les premiers commerçants européens qui s'implantent dans les cercles d'Agadez. Bourgès, qui avait pris une part importante à la répression de la révolte touarègue de 1917, est l'un des premiers européens dans la ville d'Agadez qu'il va choisir pour lancer ses affaires dans une boutique bien achalandée non loin du vieux marché Tamalakoye. Il devait approvisionner les militaires français et leurs nombreux tirailleurs sénégalais appuyé en cela par des commerçants Arabes originaires d’Algérie ou de Libye (Grégoire 2000). Son établissement, en 1920, est de faible importance au regard de la modestie de la vente d'étoffes importées du Nigeria et l'exportation de bétail en direction de la colonie anglaise (Gouvernement de l’AOF 1933). Costa, dirigera une affaire du même niveau que Bourgès, mais contrairement à ce dernier, lui se livre exclusivement à l'exportation de bétail au Nigeria et n'importe rien en contrepartie. La société cessera de fonctionner suite au décès de l'entrepreneur en 1929 (Gandah Nabi 2011).
Si le milieu urbain d’Agadez se développe, au profit des commerçants arabes ou maures déjà installés et de populations venues du sud pour travailler, grâce à la sécurité apportée par le colonisateur, cela se fait au détriment des populations touarègues, par essence pastorales et rurales, qui n’ont pas pu ou su saisir les opportunités offertes par cette conjoncture favorable, au point d’être économiquement marginalisées. Ce ne sera qu’avec les années 70-80 et le Paris-Dakar entre autre, que les Touareg trouveront une expression économique de leur qualité avec le tourisme du désert, insuffisant néanmoins pour éviter les rebellions.
Âpre et monotone terre à mil et à pâturages, le Damergou est dominé par les Touareg Imouzourag qui, moyennant prestations en nature, se posent en protecteurs des sédentaires haoussa et béribéri, et par les Touareg Kel Owey qui, outre leur intense activité caravanière, s’adonnent volontiers à des actes de pillage qui leur rapportent des captifs et des provisions. Ces voisins et adversaires se disputent depuis longtemps la prédominance dans le pays, les Imouzourag fondant leur prétention sur l’ancienneté de leu présence, les Kel Owey s’appuyant sur leur force économique et guerrière. Seul le statut du villageois, paysan sédentaire, est permanent mais peu enviable : c’est lui qu’on pressure et qu’on razzie.
L’opposition entre les deux groupes touareg s’exacerbe lorsqu’à la tête des Imouzourag Moussa décide de ne pas laisser le lucratif commerce saharien aux seules mains des Kel Owey. Prenant prétexte d’un conflit mineur, les Kel Owey livrent une bataille aux Imouzourag « avant que Moussa ne devienne trop puissant », mais ils sont battus et vont se mettre en quête d’alliés pour reprendre le dessus. Sollicités par les deux antagonistes, Foureau et Lamy promettent leur concours à ceux qui leur procureront les chameaux indispensables à leur marche vers le lac Tchad. Seuls les Kel Owey sont en mesure de fournir ces montures et les Français les proclament « nos alliés » ce qui a pour résultat, à Tanamari, l’écrasement des archers de Moussa par les Kel Owey aidés des tirailleurs munis d’armes à feu. Un tel événement ne saurait être oublié ni pardonné par les Imouzourag qui, à Farak, tout juste un an après en juillet 1901, infligent à une considérable caravane Kel Owey une déroute. Mais, inlassablement traqués par des groupes de tirailleurs français, les Imouzourag dirigés par Denda prennent la fuite, sont en butte à de graves difficultés d’approvisionnement (ils n’ont, à l’est, personne à « protéger ») et doivent assister, dans le dénuement et la lassitude, à la consécration, par les Français, de l’Anastafidet Jatau des Kel Owey à la tête du Damergou. Cependant, le trafic saharien périclite, surtout du fait de la disparition de la principale marchandise, l’esclave. Dépourvues d’ambitions, dès l’instant où le lac Tchad a été atteint, les autorités coloniales ne cherchent qu’à maintenir l’ordre dans un pays déshérité et austère. L’élément local le plus dynamique est donc en plein déclin et l’Européen nouveau venu se limite à de mornes tâches routinières : dès lors, la région va s’enliser dans un profond marasme (Rash 1973).
Les débuts de la période coloniale
Les Français installent un premier poste militaire à Djadjidouna en plein Damergou pour mieux maîtriser la route caravanière et commencent l'instruction fin 1901 des premières unités méharistes du Niger, dont un premier peloton serait opérationnel dès 1902 sous le commandement du Capitaine Cauvin. Sa première véritable mission sera la protection de la Taghlamt jusqu'à l'Aïr, en proie à de nombreux rezzous Touareg et Toubou, sous le commandement du Lieutenant Plomion, qui escorta la caravane jusqu’à Toureyet, et même sans ordres, poussera jusqu’à entrer dans Agadez début 1903, accueilli comme un libérateur par le Sultan au vu de la situation politique intenable qu’il vit (Jean Lt 1909). Le Lieutenant Plomion sera remplacé par le Lieutenant Jean en août 1904.
A l'ouest de l'Ighazer, l'Aménokal Mohamed El Kumati des Kel Dinnik (Ouelleminden de l'est) faisait sa soumission aux Français, se faisant toujours représenté par son homme de confiance, il mourut à Afukada près d'In Gall en 1903, sans jamais avoir croisé un seul français. La rivalité dans la succession incita les français à promouvoir Ismaghil, plus en clin avec la politique des colons que son cousin Rezzi. Il est intronisé le 15 novembre 1903 en présence du Lieutenant Colonel Noël. Rezzi, à la suite de la palabre d’Asawas en Ighazer, entrera en dissidence et se cachera alors avec ses partisans entre In Gall et Tegidda n’Tesemt parmi les tribus encore insoumises, Kel Fadey, Kel Hoggar notamment (Nicolas 1950).
- 1904
En février 1904, le Capitaine Delestre, commandant le Cercle de Tahoua, créera également une unité méhariste, à la suite d'une intervention entre les Kel Tamesna et les Kel Fadey. Ces unités seront essentielles dans la colonisation du Nord Niger grâce à leur mobilité calquée sur celle des Touareg en rezzou. Elle sera opérationnelle en octobre 1904. En août 1904, la protection de la Taghlamt jusqu'en Aïr (10 000 chameaux), amènera le Lieutenant Jean à faire son entrée à Agadez le 12 septembre, en compagnie du Lieutenant Bandiougou qui installe son campement près du puits de Tansamane, tout comme la mission Foureau-Lamy l'avait fait avant lui. La mission devait initialement passer par Aouderas, mais les conditions difficiles leur feront éviter cette direction pour entrer directement sur Agadez (Jean Lt 1909).
L’objectif principal des français et d’obtenir les soumissions de toutes les tribus qui sont sensée être sous le jougs du Sultan de l’Aïr et de l’Anastafidet des Kel Owey. Ainsi, l’escorte de la Taghlamt qui entra à Agadez prévoyait également de passer par In Gall pour y rencontrer la section montée de Tahoua, dans le but d’en imposer aux Kel Fadey et Tamesgidda qui défient l'autorité du Sultan et des français. Les français veulent mettre leurs chefs Oanagoda et Inat sous l'autorité du Sultan pour ne plus mettre d'entrave à l'exploitation du sel d'In Gall. Une fois encore, tout comme dans le Damergou, le soucis des français est de libérer les entraves au commerce local en proie aux rezzous (Jean Lt. 1909).
Oanagoda et Hammaté, chefs Kel Fadey, Meyloukou pour les Kel Tédalé avaient ainsi le don de terroriser l’Aïr par leur simple apparence. Ces maîtres de la flibuste saharienne avaient à leur actif tant de coups heureux, que leur nom seul effrayait tout le monde. Le Sultan avait perdu tout crédit auprès des populations d‘In Gall et de Tegidda n’Tesemt qui depuis longtemps n’attendaient plus rien de ce côté. D’ailleurs, c’étaient bien ces derniers qui prélevaient les impôts. Les sauniers d'In Gall, sans plainte possible étaient tenus en captivité par les Kel Fadey, qui faisaient des rezzous jusqu’aux portes de Tahoua, mais peu en Aïr eu égards aux Kel Ferwan, Kel Hoggar et Kel Rharous également rapines aux dires du Lieutenant Jean. Si les tribus proches du Sultan et de l’Anastafidet faisaient leur soumission dont les Kel Ferwan, qui joueront quand même un peu double jeu, le tam-tam de guerre sonne pour les Kel Fadey, Kel Hoggar, Kel Rharous, Kel Tédalé et Ifadeyen qui restent insoumis.
Le 16 septembre les Kel Rharous faisaient leur soumission et Oanagoda des Kel Fadey faisait dire de ne pas compter sur lui pour se soumettre, tout comme les Tamesgidda. Le Capitaine Delestre atteint Tegidda n’Tesemt le 18 septembre 1904 et envoi un courrier à Agadez pour le Lieutenant Jean, mais ce dernier est en route vers le sud contre des Tamesgidda hostiles. Avec le concours des autorités coutumières, les français organisent deux colonnes pour convaincre les récalcitrants.
S'en suivent des opérations de police auprès des tribus soumises et non soumises, dont un contre-rezzou organisé par Yato, Anastafidet des Kel Owey, sur les Kel Fadey, dont le chef était Oanagoda, les Kel Rharous et Kel Hoggar, rapportant les impôts de soumission le 28 septembre. Le lieutenant Jean se porte sur In Gall pour faire la jonction avec la section méhariste de Tahoua. Il atteint la petite ville le 23 septembre à minuit, rejoint le lendemain matin par le Capitaine Delestre. Ils y installeront un petit poste militaire statique. Avec 300 partisans Kel Dinnik et leur chef Ismaghil, le Capitaine Delestre souhaite mettre à la raison Rezzi, réfugié chez les Kel Fadey, ne reconnaissant pas le nouvel Aménokal. Cette jonction est aussi faite pour en imposer aux Kel Fadey et Tamesgidda qui défient l'autorité du Sultan et des français dont Oanagoda et Inat leurs chefs (Jean Lt 1909).
Afin de contrôler les caravanes, poumon économique de la zone et de prendre les contacts nécessaires auprès des tribus nomades, l'occupation d'Agadez est devenue prioritaire et les 2 unités s'y rendent dès le lendemain. Le Lieutenant Jean y entreprend la construction du poste d'Agadez près du puits de Tansamane. Après un bref séjour à Agadez, le Capitaine Delestre retourne à Tahoua le 13 octobre en ayant relevé le poste d'In Gall par une section du Lieutenant Jean.
En décembre, visite du Colonel commandant du Territoire militaire, seuls les Kel Fadey restaient insoumis. Avec eux, des débris nombreux d’autres tribus se groupaient et formaient environ six cents malfaiteurs qui ne cessaient de ravager l’ouest de l’Aïr, principalement In Gall et Tegidda n’Tesemt. Ils venaient jusqu’aux portes d’Agadez et convoitaient même les parcs d’animaux du jeune poste militaire. Malgré leurs feintes de tranquillité, les Ikaskazan et les Kel Ferwan se compromettaient avec eux, les renseignaient et les protégeaient. Mais là aussi le double jeu étaient de mise, Oanagoda recevant des Ikaskazan de fausses nouvelles qui les maintenaient dans la peur. Oanagoda ne souhaite toujours pas la soumission et veut continuer à vivre comme avant les français, refusant les amendes infligées par le Sultan pour un pillage.
Jamais Oanagoda ne viendrait à Agadez et tous les Kel Fadey partageaient ses intentions. Ils comprenaient qu’ils seraient poursuivis, car ils entendaient ne rien changer à leurs habitudes, ils étaient décidés à se laisser tuer plutôt que de se rendre à qui que ce soit. Cette tribu commandait souverainement à toute une région voisine d’Agadez, celle d’In Gall Tegidda n’Tesemt, où tous les Touareg du sud-est avaient des intérêts. Les sauniers de Tegidda, sans plainte ni fuite possible, étaient tenus par elle en captivité. Le pays en entier était troublé car les nombreux malfaiteurs qui vivaient de pillages et trouvaient donc refuge et encouragements chez les Kel Fadey où ils se croyaient inattaquables.
En décembre toujours, à la suite des attaques des Ouled Siman sur les Kel Aïr à Fachi, Agadez dû se préparer à une opération de police en territoire non conquit et décida de rappeler les tirailleurs en poste à In Gall. Les chefs d'In Gall et Tegidda n’Tesemt supplieront qu'on ne les leur enlèvent pas, ayant trop peur des représailles des Kel Fadey, le chef de Tegidda n’Tesemt était prévenu qu'il aurait la tête tranchée. Statuant sur le cas des Kel Fadey, le Commandant du Territoire leur donnait un mois pour acquitter leur amende, sinon ils seraient déclarés rebelles. En attendant les opérations de polices se poursuivaient dans tout l’Aïr et recevaient un accueil pacifique, revenant avec les impôts de soumission, généralement du bétail.
C’est dans ce contexte qu’arriva l’ordre d’évacuer le poste d’Agadez. La mise en demeure du Commandant du Territoire ne pue qu’enorgueillir les Kel Fadey voyant les français refuser le combat. Il s’ensuivit une période de rezzou surtout contre les Ouelleminden, les Kel Fadey cherchant à rassembler autour d’eux les dissidences de toute la région pour fomenter une révolte contre le colonisateur. L’évacuation d'Agadez ne pouvait se faire sans remédier à cette situation.
- 1905
Début 1905, le Lieutenant Jean effectue des opérations de police auprès des Kel Fadez et Kel Rharous dans la Région d'In Gall, leur infligeant de lourdes pertes et récupérant du bétail. Refoulés d’un puits à l’autre, poursuivis, les Kel Fadey perdirent presque tous leurs troupeaux. Ils eurent des morts à Anyokan où ils essayèrent la résistance, à Tchimouménène, à Marandet. A Azelik, la bagarre fut plus rude, ils faillirent mettre la main sur quinze fusils en se jetant par trois à quatre cents sur un Européen et quinze tirailleurs exténués, mais finalement ils durent se mettre en fuite en laissant des cadavres nombreux. La Région était purgée, une partie des Kel Fadey émigrant au Damergou, Oanagoda était en fuite. Malgré ces opérations de police, qui font régner l'ordre le temps de leur passage, les Kel Fadey partisans de Rezzi s'attaquent aux Kel Dinnik partisans d'Ismaghil. Le ministre des colonies fait évacué le poste d'Agadez, vraisemblablement sans trop comprendre les enjeux de protection de l'économie locale et des prétentions ottomanes sur le Nord Niger. L'évacuation sera faite le 31 mai 1905 sans que la zone ne soit véritablement soumise, mais les français exercent néanmoins une sécurité pour les caravaniers. Cette première incursion des français en Ighazer et Aïr ne fut pas du goût de plusieurs tribus qui effectuèrent des représailles vis à vis de ceux, soumis ou près à se soumettre. Ainsi, le 1er juin 1905, la ville d'In Gall fut mise à sac par un rezzou, qui poursuivit le 3 juin jusqu’à Tegidda n'Tesemt, faisant nombre de victime.
L’occupation de la région est intermittente. Le chef de bataillon Gadel va chercher le géologue Chudeau à Iférouane en septembre 1905, enclenchant les prémices de la recherche géologique saharienne qui cherche les voix de la prospérité économique des terres sahariennes françaises. En octobre, le Chef de Bataillon Gadel remettait en place la Sansani pour garder quelques relations avec les tribus nomades. Cette réunion des chefs traditionnels servait autrefois à la préparation de la Taghlamt.
Les années 1906 à 1908 seront marquées par de multiples accrochages entre les tribus non soumises et les français, mais aussi nombre de rezzous sur les caravanes trop peu protégées.
- 1906
En avril 1906, devant les velléités territoriales de l'Empire Ottoman et de l'Allemagne, la France décide d'occuper les postes d'Agadez et de Bilma pour tenir les frontières. Le Lieutenant Massé occupe la ville sultanienne le 7 juillet et est rejoint par une unité méhariste le 11. Une autre section aux ordres du Lieutenant Garnier de la Roche fera également son entrée à Agadez le 10 juillet, venue de Tahoua par l'Ighazer. Les mois de juillet et août allaient être consacrés à l'aménagement du poste et à renouer les liens avec des tribus opposées à cette occupation, Kel Fadey, Kel Rharous, Kel Hoggar et Kel Tédalé. En juillet, le Lieutenant Garnier de la Roche faisait un reconnaissance jusqu'à Tegidda n'Tesemt au moment de la Cure Salée. Rezzi montrait alors de meilleures dispositions vis à vis des français, ce qu'il confirmera lors de la venue du chef de cercle de Tahoua, le Capitaine Laforgue, cherchant avec son unité les meilleures voies de passage pour le ravitaillement d'Agadez et de Bilma. A la fin du mois de septembre plus de 100 tirailleurs étaient présents sur Agadez. En octobre, le Lieutenant Massé mené une action de force fasse aux Kel Tédalé qui se soumettaient et rentraient sur Agadez pour la Sansani.
Le 12 octobre, le Lieutenant Massé et le Lieutenant Théral rencontraient à Iférouane le Commandant du détachement algérien de Tidikelt, faisant ainsi la première jonction avec les oasis sahariennes (Nicolas 1950). Cette jonction produisit une forte impression sur les Touaregs qui s’imaginaient que nous ne pouvions traverser le désert. Vers le Kawar le commandant Gadel poussait jusqu'à Djado et créait un poste à Bilma de septembre à novembre 1906. Le 11 novembre, inspection du Lieutenant-Colonel Lamolle qui revient à Niamey en passant par In Gall et Tawa.
Mais les passages de plus en plus fréquents des unités méharistes dans l'Ighazer ne réfrénaient que peu les ardeurs des razzieurs. En mai, rezzou des Kel Fadey sur les Kel Dinnik de Tahoua. Le 8 décembre, un fort rezzou toujours des Kel Fadey sous les ordres d'Albakka, neveu d'Oanagoda pillé la tribu des Dagamena. Un contre-rezzou mené par Toulman, un notable de Tahoua, recoupé les razzieurs au nord de Tegidda n'Tesemt, où Toulman perdra la vie.
- 1907
Au 1er janvier 1907, les unités méharistes sont désormais officielles, ce grand changement est budgétaire puisqu'au lieu de supporter le fonctionnement de ces unités sur les budgets locaux, ce sera le budget militaire qui y sera consacré. De plus, cela est la reconnaissance que ces unités sont essentielles pour assurer la pacification des territoires occupés. Une unité est détachée à Agadez, la Section Méhariste de la 2è compagnie de Zinder, composée d'un officier, de 2 sous-officiers et de 57 tirailleurs, avec 2 chameaux de selle par personne et 60 autres de bâts pour le transport des ravitaillements. Avec l'occupation de Bilma, la section méhariste d'Agadez allait être appelée dans cette zone pour ses manœuvres, tandis que celle de Tahoua décalée sa zone d'activité sur l'Ighazer et l'Aïr, la France tendant de contrôler le Nord Niger de l'Aïr jusqu'au Tibesti. Le 7 février, le chef Kel Ferwan, Aghali se retire en Aïr après avoir entraîné sa tribu en désobéissance.
Juin-juillet, l’Aïr est en effervescence, le Commandant Betrix envoi de Zinder la colonne du Capitaine Posth a Agadez, ou elle arrive le 8 octobre et opère contre les insoumis Kel Gharous et Ikaskazan. Le Capitaine Posth, premier commandant du cercle d'Agadez, fait des tournées de police en Ighazer d'avril à septembre, il relèvera de leur fonction les chefs Kel Fadey et Kel Ferwan, installera un poste provisoire à Tegidda n'Tesemt pour la surveillance de la Cure salée et détachera une section pour surveiller la récolte des dattes d'In Gall en juillet. Il rentrera le 11 septembre à Agadez en compagnie du Commandant de cercle de Tahoua, le Capitaine Laforgue, pour la Sansani qui se tiendra le 15 du même mois, en présence du Chef de Bataillon de Zinder le Lieutenant-Colonel Bétrix. Ce dernier destituera le Sultan d'Agadez, Ousmane Makitane, au profit de son fils Ibrahim Dassoki. Cette Sansani se tient sans la présence des Kel Fadey, Kel Gharous et Kel Hoggar qui marquent ainsi leur désapprobation de l'occupation française, ce qui va déclencher de multiples opérations de police menées par le Capitaine Posth et le Lieutenant Théral, en relation avec le commandant de cercle de Tahoua. Du 3 au 10 septembre le Capitaine Laforgue est à In Gall, il y rencontre les chefs Ouelleminden et Kel Gress qui font leur Cure salée et continuent sur Agadez avec le Lieutenant Théral revenant de mission dans l'Azawagh. Fin 1907, le Lieutenant Théral mènera une nouvelle opération contre les Kel Fadey dans les monts Izazan près d’In Gall et rentrera début 1908 à Agadez. Le nord Aïr est pacifié.
- 1908 - 1914
L’instabilité toujours présente, se manifeste également par les changements successifs de Sultans en 1907 et 1908 verra la mise en place d’AbderRahim Tagama. Lors de son intronisation, fut faite à Agadez la jonction entre les méharistes algériens (lieutenant Sigonney) et ceux de Zinder (chef de bataillon Mouret), rendue nécessaire pour la mise en place d'un courrier permettant l'échange de renseignements. Sigonney y séjourna du 10 au 17 septembre 1908. Le colonel Laperrine écrivait au sujet de cette reconnaissance : « Au fond, cette promenade pacifique de mille trois cent cinquante kilomètres, qui n'a coûté ni un homme, ni un méhari, ni un centime à l’État, a produit plus d'effet qu'un contre-rezzou couronné de succès. Elle va très probablement amener la soumission sans effusion de sang des derniers dissidents de « l'Aïr ».
Cette année là, la Cure salée est surveillée par la section méhariste de Tahoua, Lieutenant Peignot et Sergent Desmettre, 59 tirailleurs, 2 autres sergents indigènes et 190 chameaux sont présents. Du 12 au 16 août, ils sont à In Gall puis remontent le 19 à Tegidda n'Tagait et sont à partir du 25 à Tegidda n'Tesemt. En octobre, la section sera sur Agadez pour la Sansani et retournera ensuite à la surveillance de la Cure salée. Lors de cette Sansani, sera prononcée l’intronisation du nouveau Sultan d'Agadez, Tagama, par le lieutenant Colonel Mouret.
En 1909, la section méhariste d'Agadez est le plus souvent appelée à Bilma et comme l'année précédente se sera la section de Tahoua qui assurera la sécurité autour de la Cure salée avec le Lieutenant Dechebarre qui séjournera 4 jours à In Gall. Par arrêté du Gouverneur général du 22 juin 1910, le Territoire militaire de Zinder est détaché du Haut-Sénégal-Niger et devient le Territoire militaire du Niger, englobant Gao et Niamey. L'année 1910 est une mauvaise saison des pluies, couplée à des épidémies en particulier de variole. Il en sera de même en 1911.
En 1912, la France choisie de tracer la voie du chemin de fer, outil de développement économique essentiel. La mission du Transafricain menée par le Capitaine Nieger, tracera la voie entre Ighazer et Aïr, préfigurant l'actuelle route de l'uranium. Mais les tergiversations politiques ne permettront jamais de réaliser cette voie.
Les mauvais hivernages se succèdent, 1913 et encore une mauvaise année de pluies, sauf en Ighazer, et en 1914 c'est la famine au Soudan. Le Sultan Tagama se distinguera dans l'abnégation auprès de ses concitoyens et cette année sera son année "Younwa Tagama". En juin 1913 la section méhariste d'Agadez nomadise dans la région d'In Gall et reprendra des forces en pâturant dans la zone d'Aderbissinat.
La révolte de Kaocen
Après cette période trouble, faite d'exactions des deux camps où les français ne mirent jamais l'Aïr et l'Ighazer sous leur domination complète, vint la première guerre mondiale qui incita les Touaregs au soulèvement contre les français dans toute la région sahélienne. En 1916, cette révolte est plus un ensemble de soulèvements isolés de factions Touareg, recherchant leur mode de vie passé que la présence des français contrariée. Elle durera près de 2 années et fut réprimée parfois violemment. Car il faut bien dire que l’engagement des français pour administrer au mieux ces régions est des plus timoré. D’une part le financement de cette occupation n’est pas acquis et les besoins nourriciers et logistiques des militaires spolient les populations locales qui, lorsqu’elles sont mécontentes, se font réprimées. Par ailleurs, la « destination » n’est pas la plus prisée pour faire carrière et bien souvent ce sont des officiers sans envergure ou alors blessés de guerre qui occupent les postes avancés d’Agadez, de Bilma ou encore du Tibesti (Dufour 1987).
En 1915, le Sultan Tegama qui avait fait allégeance en secret à la Senoussia, une confrérie islamique ayant sa base au Fezzan sous influence ottomane, fait assassiné près d'In Gall son chef de guerre le Tourawa Melé, alors resté fidèle à la cause française, et fait endossé le crime aux Kel Fadey. Ce fait d’arme marquent bien la préparation des insurgés, coupant la tête à toute trahison. Le capitaine Bosch, alors en poste à Agadez, ne jure que par Tegama son ami et bientôt traite. Fort heureusement, fin novembre 1916, il est relevé par le Capitaine Sabatié, grand blessé de guerre à peine convalescent, qui immédiatement remet en ordre le poste militaire et le fortifie. Bien lui en a pris, puisque le 13 décembre le beau-frère de Kaocen entre à Agadez et se fait malencontreusement démasqué mettant ainsi le poste en alerte. Aucune action n’est tentée contre le poste et le Lieutenant Fons, alors en patrouille dans la région d’Aguelal avec 35 tirailleurs, rentre dans le réduit fortifié sans encombres, le jour même où Kaocen entre à Agadez, le 15 décembre 1916 (Dufour 1987). Les autres sous-officiers et tirailleurs en patrouille n’auront pas cette chance, et notamment les officiers et tirailleurs rentrant de la Taghlamt de Bilma qui se feront surprendre par les sénoussistes. Seul le capitaine Maffre et quelques tirailleurs arriveront à rejoindre Zinder, le fort d’Agadez prendra par la suite le nom du sous-Lieutenant Dufau, dont la tête fut exposée dans la ville d’Agadez. Les femmes des tirailleurs restées en ville seront acheminées en tripolitaine pour y être vendues, assurant ainsi la motivation des français pour ne pas déserter le fort.
Le siège d'Agadez qui s’en suivi durera 81 jours au début de l'année 1917, mené par Kaocen et ses troupes au nom de la Senoussia. De mère Ikaskazan et de père Kel Fadey (Kel Tamesna), il a parcouru toute sa jeunesse le Damergou, razzieur invétéré depuis tout petit. Malgré 200 rebelles à ses ordres, et des armes abandonnées par les italiens dans le Fezzan, dont des canons, il semble que les troupes de Kaocen ne furent jamais en position de prendre le réduit fortifié. Des obus à mitrailles trop loin pour espérer ébrécher les défenses de banco, face à des tirailleurs somme toute aguerris à la vie de militaire, à se demander si les rebelles veulent prendre le fortin ou s’ils ont déjà bien compris qu’il n’en avaient pas les moyens. Kaocen lui poursuit ses razzias dans son pays natal du Damergou, chameaux et céréales semblent ses seules préoccupations. Son beau-frère Ghali tentera avant l’arrivée des français un grand assaut, mais après 15 tués dans ses rangs c’est la débâcle, les rebelles commencent alors leur repli en Aïr (Dufour 1987).
Le 5 février 1917, le Chef de Bataillon Berger reçoit l'ordre de se porter depuis Ménaka sur In Gall pour empêcher le reflux des rebelles vers l'ouest. La colonne Berger arrive le 5 mars à In Gall et organise la ville. La colonne refoula vers le sud les Touareg de I'Azawagh avec leur bétail pour les isoler de Kaocen et leur fait regagner leurs pâturages de saison sèche. Arrivée à Tchimouménène, une escarmouche tuait quelques rebelles, puis arrivant sur In Gall, la colonne bombardait la ville au 80 mm pendant une heure et y entrait sans résistance. Aux bruits assourdissants inconnus, les Illabakan nomadisant alors en compagnie des Kel Eghlal, Isheriffens, Ikadamaten, Iberogan, prirent peur et tous détalèrent au son de ce bruit alors inconnu (Bernus 1974). In Gall était alors considérée comme un repaire des rebelles, et la colonne Berger s'engagea également dans des exactions sur les habitants de cette ville, destinées à nettoyer toutes nouvelles velléités de rébellion en Ighazer. Le groupe méhariste stationna alors à Tchimouménène. Du 5 au 16 mars, il fit des reconnaissances dans la région jusqu'à Tegidda n'Tesemt. Il rentra à Agadez le 18 mars 1917. Après quelques opérations communes avec la colonne Mourin en Aïr, les méharistes reviennent sur In Gall le 6 mai pour assurait la pacification de la zone. Le 21 mai, quelques escarmouches sont à signaler sur un bivouac méhariste. le 1er juin Berger marche sur Sekiret où il inflige de sérieuse pertes à des groupes rebelles. Les Kel Dinnik, Kounta et Almoussakaré se rallient à la France. La colonne Berger quitte In Gall le 21 juin 1917 en laissant le Capitaine Cadence construire le fort d'In Gall sur un promontoire à l'entrée de la ville. La section méhariste est commandée par le sous-Lieutenant Nédelec.
A la fin de février 1917, venant du Hoggar, le capitaine Depommier passe à Tin Zaouaten où des nomades lui annoncent que Moussa ag Amastane (Aménokal des Kel Ahaggar du Hoggar) a pactisé avec Kaocen et se trouve à Agadez. Le Capitaine décide de continuer vers Agadez pour prêter main forte aux colonnes de secours mises sur pied par les occupants. Le 12 mars, à In Abangarit, après un combat qui leur coûte deux tués et cinq blessés, les dissidents doivent abandonner un troupeau de six cents chamelles. Trois jours plus tard, nouvel accrochage à Taket n'Koutat les dissidents perdent un tué et deux prisonniers. Le 23 mars, enfin, la colonne Depommier rencontre Moussa ag Amastane dans l'Oued Tanefset. L'aménokal des Kel Ahaggar donne aussitôt des explications sur son attitude qui, de loin, avait paru douteuse. Resté fidèle, profitant du trouble causé à Agadez par l'arrivée de la colonne Mourin (3 mars 1917), il s'est évadé et aussitôt libre, il a rassemblé ses partisans, s'est lancé à la poursuite de Kaocen devenu son ennemi juré, car il vient de l'humilier gravement en le retenant prisonnier et lui a infligé de lourdes pertes alors qu'il fuyait vers le Fezzan. Après s'être vengé, Moussa a rejoint ses campements, c'est là que le capitaine Depommier l'a retrouvé.
L'arrivée de Zinder d'une colonne française forte en nombre et en arme, coupable d'exactions sanguinaires, menées par le Lieutenant Colonel Mourin qui fait assassiner l'ensemble des marabouts d'Agadez, pourtant désireux de coopération avec les français, eux-même trahis par le Sultan Tegama. Son entrée dans la ville eut lieu le 3 mars 1917, après quelques accrochages aux abords de la ville, elle fut vite désertée par les rebelles permettant l'occupation rigide des colons. La colonne Mourin sera rejointe par la colonne Berger venue de Ménaka par Tahoua et In Gall. Si la ville est libérée, les révoltés se retranchent dans les montagnes de l’Aïr qui les protègent.
La rébellion se poursuivit dans les montagnes de l'Aïr, les tribus se soumettant peu à peu à l'ordre colonial, les chefs sont capturés ou morts au combat. 110 Kel Fadey sous les ordres d'Issiad, participent aux cotés des français à un contre-rezzou sur Kaocen dans le Damergou, ce dernier cherchant à réapprovisionner ses troupes. Les Kel Ferwan, Kel Gress et autres Imghad sont instrumentalisés par les français que les lancent à la chasse contre les rebelles de Kaocen leur permettant de retrouver des habitudes de razzia dédouanant ainsi le colonisateur et laissant les règlement de compte héréditaire entre tribus se faire. La fin de cette révolte marqua la véritable emprise des colons sur tout le pays jusque dans le Kawar. Kaocen, l'Ag Adodé (Aménokal des Kel Owey) et le Sultan Tagama, qui avaient trahi les français, finirent plus tard morts ou arrêtés entre Fezzan et Tibesti. Après la libération d’Agadez les soumissions s’accélèrent, les arabes Deremchaka se soumettent à In Gall, leur chef est fusillé avec les principaux notables, les arabes Yaèddès également (Nicolas 1950). Kaocen, devenu gênant, sera assassiné par les sénoussistes, Tegama sera fait prisonnier au sud du Tibesti et décédera curieusement dans la prison d’Agadez avant tout jugement.
Les conséquences de la révolte de Koacen furent importantes. D’une part la répression exercée par les français dans tout l’Aïr, brûlant toutes les habitations et mosquées susceptibles d’apporter une aide aux rebelles, entraînera une émigration massive de l'Aïr et la destruction de ses centres islamiques (Vidal Castro 2007). Les Kel Owey sont parqués entre Azel et Alarcess près d’Agadez. Tous n’ont pas participé à la révolte, mais Fona, leur chef a été un des leaders, en tant que lieutenant de Koacen. Capturé à Kano et rendu aux autorités françaises, il a été exécuté. Cela en était fini de la suprématie des Kel Adodey partis en dissidence et qui, très réduits en nombre et écartés de la chefferie, n’ont jamais retrouvé leur statut d’antan. Ils ont été incorporés administrativement à la tribu Kel Tafidet, branche cadette des Kel Adodey qui n’avait pas accès à la chefferie.
Pendant les années de répression qui ont fait suite à la révolte de Koacen. Les tribus dissidentes de l’Aïr ont été regroupées dans la vallée du Telwa à Alarcess et Azzel, près d’Agadez, pour signer leur acte de soumission, réorganiser les tribus et désigner des chefs favorables au pouvoir colonial, récolter l’impôt et pour qu’enfin elles se fassent recensées (hommes et cheptel). Il semble très difficile aujourd’hui de faire l’histoire de cet épisode difficile, appelée « amana » (Gagnol 2009). A part quelques individus isolés, comme à Timia et à Bagzan, toute personne rencontrée a été considérée comme ennemi et tuée sur-le-champ. Les maisons ont été brûlées, les palmeraies incendiées, les mosquées dévastées. Dans leur majorité, les Kel Owey n’ont pourtant pas soutenu la révolte et ont considéré Koacen comme un aventurier sans scrupules et inapte à commander et à mener une guerre sainte au nom de l’Islam. Les Kel Owey ont du subir les dévastations et la répression féroce du pouvoir colonial, mais aussi les pillages et les vexations des troupes de Koacen. Les jardins ont été abandonnés, les troupeaux volés ou décimés, une partie de la population est morte à cause des épidémies et des famines qui se sont déclenchés. Avec la fin de l’opération de « nettoyage » qui a mis l'Aïr en feu, la paix française violemment acquise, ce n’est donc qu’une partie des tribus restructurées par l’administration coloniale qui s’est établit à nouveau dans l’Aïr (Gagnol 2009).
Lors de la réoccupation militaire de l'Aïr, les autorités françaises ont donc dispersé et parquées de force toute la population Kel Owey de son territoire, qui est resté en ruines jusqu'à ce que la réinstallation soit autorisée en 1922. La population de chameaux a également été décimée. Une politique de sédentarisation a été mise en place, ainsi que l'institution d'une autorité française effective. L'administration militaire a fourni des puits en béton et des écoles, a donné des incitations à l'agriculture et à l'élevage (Mortimore 1972). Des érudits ont montré la voie, comme Malam Musa, fondateur de Tabelot, est le plus illustre représentant de ce que Triaud a appelé les « marabouts-jardiniers », qui ont su mettre en place un nouveau modèle socio-économique pour les Kel Ewey après la « ruine de l’Aïr » (Gagnol 2009).
Par ailleurs, le pouvoir colonial va renforcer une institution propre aux Kel Owey, celle de l’Anastafidet et qui n’existe pas chez les autres Kel Ayar qui n’ont qu’un Ettebel. Les Kel Owey avaient un Ettebel, l’Ag-Adodey qui fut évincé et perdit son titre tout comme sa tribu perdit la chefferie et l’Anastafidet qui représente un dédoublement de l’institution du sultanat, même si les Kel Owey suivent aussi le Sultan de l’Aïr. L’Anastafidet représente pour les Kel Owey ce que le Sultan est aux Kel Ayar, il est également de condition servile et est établi à Assodé, en lieu et place de l’Aghumbulu (Amenokal des Iteseyen), depuis le départ des Kel Gress et Iteseyen chassés de l’Aïr au XVIIè siècle. Le pouvoir colonial a ainsi considéré que l’Aïr relevait de l’autorité du Sultan, tandis que les Kel Owey étaient gouvernés par l’Anastafidet. L’Anastafidet était tout au plus l’émissaire des Kel Owey auprès du Sultan et des Ighawelan installés en pays Hausa. Claudot-Hawad a parlé à ce propos de « bévue coloniale » (Claudot-Hawad et Hawad 1988).
En Azawagh aussi
Depuis l'arrivée d'une force d'occupation dans la région, le 4 décembre 1900, jusqu'à la mort de Mokhammad ag Elkumati en octobre 1903, la politique des Kel Dinnik a été d'éviter le plus possible le pouvoir étranger tout en se livrant à des pillages chez d'anciens tributaires qui s'étaient soumis. Cette stratégie avait réussi à Elkumati en tant qu'Amenokal. Lorsqu’il devait fournir des actes de soumission au colonisateur français, il envoyait deux de ses forgerons, Badidan et Nasirun, pour négocier. Un document intitulé « Acte de soumission des Ouelleminden qui ont pour chef Mohammed » fut finalement signé le 31 décembre 1901, mais Mokhammad refusa jusqu'à sa mort de rencontrer les colonisateurs. Sa mort fournit la première occasion aux Français pour intervenir effectivement dans la politique des Kel Dinnik. Elle ouvrait une succession difficile qui mettait en présence deux candidats : Rhezi ag Ennefrawi et Ismaghil ag Lasu. La préférence des Ouelleminden allait vers Rhezi mais celle des colonisateurs vers Ismaghil qui fut mis en place, construisant ainsi un chef pour les futurs révoltés.
Pour Delestre « Le choix d’Ismaghil au contraire serait d'un heureux présage; autoritaire et brave, très craint sans pour cela être détesté, son élévation à la charge de tambari faciliterait sans nul doute nos relations avec les Touaregs du Nord du Cercle » (Delestre octobre 1903 cité par Brock 1990)).
« Dans un palabre tenu à Tahoua le 15 novembre et auquel assistaient tous les notables Ouelleminden, le Lieutenant Colonel commandant le Territoire a réglé la question de la succession du tambari Mohammad, Ismaghil, chef de la fraction noble des Teggirmat, héritier des biens de Mohammad d'après la loi musulmane a été reconnu comme tambari des Ouelleminden de l'Est » ((Delestre, novembre 1903 cité par Brock 1990).Cette intervention engendra un conflit entre les partisans de Rhezi et ceux d'Ismaghil qui dura pendant tout le règne d'Ismaghil comme Amenokal jusqu'à sa mort en 1911. Rhezi se soumit néanmoins avant la révolte de Kaocen, mais ne pèsera plus dans le pouvoir de l’Azawagh, actant la main mise des français sur la grande plaine, le successeur d’Ismaghil étant Alkhurer.
En Azawagh également, 1917 c’est l’année de la folie (Mariko 1984), ou « morti » la révolte pour les Kel Dinnik (Brock 1990). La répression est à l’œuvre depuis Tahoua, exécution sommaire, massacre de personne sans défense, ce sont les Imajeghen qui subiront le plus de perte entre Tahoua et Tanut (nord-est d’Abalak), avec souvent la complicité des Kel Gress, Ilisawan et Ineslemen désireux d’en profiter pour renforcer leur influence sur la zone. C’est le parallèle de Tahoua qui est la ligne de démarcation, les éleveurs ne devant pas le dépasser vers le nord pour ne pas être considérés comme rebelle (Mariko 1984). Mais elle est ou cette ligne pour des éleveurs nomades qui suivent l’eau et les pâturages ? De mars à août 1917, la colonne du Commandant Berger de Tahoua refoule vers le sud les Touareg de l’Azawagh avec leur bétail, pour les isoler de Kaocen et leur faire regagner leurs pâturages de saison sèche, ramenant à In Gall nombre de soumission des tribus Touareg, Arabes et Ineslemen. Il obtient la soumission de Shafiru ag Abdul Karim et de Khamed Elmumin, les plus grands marabouts des Kel Eghlal. Ceux-ci, sur la route du sud, croisent la colonne du capitaine Sadoux partie de Tahoua pour réduire les dissidents et leurs signalent que la majorité des Imajeghen est concentrée à Tanout de la Tadarast (Nicolas 1950). Dans des circonstances encore mal éclaircies, le Capitaine Sadoux massacre à Tanout la fine fleur des guerriers Kel Dinnik qu’il a rassemblée dans un enclos, exécutant 207 personnes selon la Capitaine Sadoux lui-même. Les derniers irréductibles de la Tamesna et de l’Aïr sont parqués par la Capitaine Sadoux dans la Tadarast au sud d’In Gall. Une autre colonne dirigée par le Lieutenant Tournat ne fera pas de quartier contres les Imghad et Eklan des Tellemides. Des Igdalen, dont l’une des moqueries que leurs octroient les Imajeghen est le non port des armes, seront massacrés également car Ineslemen des Tellemides. La chasse aux rebelles ne sera terminera qu’avec la parution de l’arrêté n°116 du 1er août 1917 dit « fermeture de la chasse aux rebelles » (Nicolas 1950 ; Mariko 1984).
Par crainte d‘une nouvelle révolte, l’Ettebel des Kel Dinnik, le tambour de guerre des Kel Nan, fut supprimé et la chefferie fut divisée en groupes nomades sur le modèle des cantons des sédentaires. Dès 1918, on assista à une complète réorganisation administrative des Ouelleminden Kel Dinnik. Les religieux seront régulièrement les bénéficiaires de ce jeu d’émiettement du pouvoir, jusqu’à ce que, in fine, leur groupe soient aussi démantelés. En 1918, les suzerains Ikherkheren du IVè Groupement, s’étant saisis de chamelles de leurs dépendants religieux Igdalen, ces derniers leur sont retirés et incorporés au IIIè Groupement commandé par les Kel Nan et les Tiggirmat. En 1921, les Igdalen leur sont retirés et avec les Isheriffen et les Iberogan constituent le nouveau VIIè Groupement, nouvelle chefferie religieuse. Vers 1945, les Ayttawari sont retirés au IIè Groupement pour former le nouveau VIIIè Groupement (Bernus 1993). En mars 1923, les goumiers d’In Gall tue Khinjera alors chef des Ikherkheren. Cet éparpillement des groupes administratifs Touaregs tient essentiellement à l'origine même de ces groupes, façonnés par l'administration coloniale, dans le but de restructurer la société touarègue révoltée, en retirant aux chefs hostiles une partie de leurs tribus dépendantes, organisées en groupes autonomes (Bernus 1974).
Les années 20, un pays désolé
A la suite de la révolte de Kaocen, Agadez et sa région était pour ainsi dire en ruine, moins de 2 500 habitants dans la ville, un commerce inexistant, un cheptel décimé, un pays ravagé par la guerre, qui ne s'en remettra vraiment que 20 ans plus tard, à l'aube de la seconde guerre mondiale. Chaque année, en octobre, la Taghlamt est organisée sous la protection des unités méharistes. Une partie importante de la colonie Touareg participe avec leurs chameaux à cette caravane qui est particulièrement fructueuse, car elle permet de ravitailler les centres de Fachi et Bilma en mil, animaux domestiques, cotonnades, et d’en rapporter des dattes et du sel qui sont écoulés ensuite par les marchés du Sud. On estimait à 24 000 le nombre des chameaux qui se rendaient ainsi chaque automne au Kawar avant les troubles de 1917. Ce nombre est, tombé à 200 et 150 en 1918 et 1919, puis est remonté en 1922 à 6800 (Gouvernement de l’AOF 1931).
Durant cette période, les français installèrent leur empreinte dans les villes en construisant notamment école et centre de santé. L'arrivée du Franc français a conduit les agriculteurs à chercher du travail en ville et la France a rapidement contrôlé tous les marchés. L'agriculture intensive a également perturbé l'écosystème ouvrant de nouveaux espaces désertifiés.
En 1918, le Lieutenant Bourgès est à In Gall, il en fera son poste-grenier le 12 juin avec une garnison fixe. Le 18 novembre, il poursuit un bandit, Alrimarett vers Tegidda n'Tesemt sans succès. En 1919, c'est le retour de la Cure salée sous la garde de 40 tirailleurs et de la Taghlamt vers Bilma. A In Gall, fusionnent les 2 pelotons méharistes 8 et 10 qui y stationneront jusqu'en 1922. Du 29 juillet au 15 août il effectueront un contre-rezzou en Azawouk sans réussite, début octobre une section méhariste est à Tegidda n'Tagait, elle nomadise ensuite dans la Tamesna puis retourne sur Tegidda n'Tesemt le 31 octobre pour la Cure salée (Carlier 2001).
En octobre 1920, la section méhariste nomadise de Tafadek à Tegidda n'Tesemt en passant par Gabos et Tegidda n'Tagait, elle est composée de l'Adjudant Mary, le Sergent Gilbert, 58 tirailleurs et 10 goumiers. Le 25 novembre à midi 14 fusils Ajjer pillent Tegidda n'Tesemt. Ils sont pris en chasse par l'Adjudant Mary qui y arrive lendemain. Le 27 il recoupe leurs traces à Azelik, il récupère le butin mais au prix de 6 tués et 16 blessés. L'adjudant Mary se verra ainsi attribuer la "Croix de guerre des théâtres d'opérations extérieurs".
Cette année là, Ibrahim Ed Dassouquy, Sultan d'Agadez à la suite de Tagama, est révoqué, c'est son fils Oumarou Ibrahim qui est mis en place. Le recensement de 1920 confirmera que le cercle d'Agadez a 5000 habitants de moins qu'en 1913, du à la guerre mais aussi et surtout aux famines et exodes qui en découlèrent.
Le 1er janvier 1921 marque pour le Niger la constitution de son territoire actuel qui deviendra une colonie française en 1922. En 1922, la politique des Français s'inverse et la population est encouragée à rentrer en Aïr, mais on est enclin à se demander s'il n'est pas déjà trop tard (Rodd 1926). La section méhariste d'In Gall disparaît, mais le poste perdure et le fort est occupé. C'est l'année de la reconnaissance des goumiers qui disposent désormais d'un statut et en 1926 feront partie intégrante des pelotons méharistes. En juin, l'Adjudant Mary accompagne le Capitaine Fonferrier, nouveau Commandant de Cercle d'Agadez, puis retourne à son poste grenier d'In Gall avant de surveiller la Cure salée à partir d'août.
Le Lieutenant Bourgès revient au Niger en réserve à partir du 25 décembre 1921. Il se retirera de l'armée pour vivre à In Gall et Agadez, commerçant éleveur, il finira ses jours à Agadez en passionné du monde Touareg.
Par décret en date du 28 décembre 1926, le chef-lieu de la colonie, Zinder, fut transféré à Niamey où tous les services, sauf le commandement militaire, furent installés dès le début de l'année 1927. Désormais la Colonie du Niger est administrée depuis Niamey, afin de diminuer le pouvoir du peuple Hausa de Zinder.
Le Niger, d'abord Territoire militaire de Zinder puis territoire civil, a acquis son autonomie administrative et financière par le décret du 13 octobre 1922. La colonie du Niger est divisée en 11 cercles civils dont Tahoua et 3 militaires dont Agadez, Bilma et N'Guigmi. Dans les cercles d'Agadez, Zinder et Dosso existent encore des sultans ou chefs de province sous l'autorité desquels se trouvent placés les chefs des cantons (Gouvernement de l’AOF 1933).
1923 est dite année des Toubou. Le 14 janvier un rezzou de Toubou accompagnés de Kel Ajjer et de Kel Ahaggar attaque les campements autour de Tegidda n'Tesemt. Ils sont mis en fuite par le Sous-Lieutenant Demergue au nord de l'Aïr. En juin, les sections méharistes sont rassemblées à In Gall. Un autre fort rezzou sur les Kel Ahaggar d'In Abangarit à Taket n'Koutat au nord de l'Ighazer est encore l’œuvre des Toubou. Le 15 septembre, le Capitaine Fevez remplace le Commandant de Cercle François rapatrié sanitaire. En fin d'année, le Lieutenant Saizieu remplace le Lieutenant Gilbert à la tête du groupe monté et accompagne le Lieutenant Bergougnave d'In Abangarit à Agadez pour régler la question de l'appartenance des Kel Ahaggar et des Almoussakaré au Niger (Carlier 2001).
Le 12 novembre 1924, le Capitaine Rottier devient le Commandant de la Section méhariste d'Agadez et prendra les fonctions de Commandant de Cercle le 25 mars 1925. En 1926, le groupe méhariste de Tahoua effectue les reconnaissances dans la zone d'In Abangarit.
1927 marque l'année du dernier rezzou au Niger, le poste d'In Gall est dissout et le Commandant de Cercle d'Agadez, le Capitaine Rayat, qui avait arrêté Tagama au Tibesti en 1919, valide le tracé de l'itinéraire automobile de Tamanrasset à Agadez en passant par In Guezzam et In Gall. C'est une année de bonnes pluies, le Lieutenant Witte surveille la Cure salée à Tegidda n'Tesemt, il décédera l'année suivante et sera remplacé par le Lieutenant Bedo.
Les années 30 et la grande guerre
Le 7 mai 1931, le Lieutenant Communal est à In Gall. En 1932, le Groupe Nomade de Tahoua est entièrement à In Gall, il sera inspecté par le Capitaine Thore à Tchimouménène le 27 octobre avant sa dissolution en décembre. Le Lieutenant Bedo récupère le commandement du Goum de Tahoua à In Abangarit, la saison des pluies est bonne et le retour sur Agadez par l'Ighazer très pénible dans les argiles mouillées. Le groupe nomade Tahoua est supprimé en 1933, il couvrait encore In Gall (Le Rumeur 1933). En 1935, Le Capitaine Arnould commande le groupe méhariste remplacé par le Capitaine Borricand en 1936. En fin d'année, le Goum d'Agadez est dans la région d'In Gall pour la reconnaissance et le balisage de l'itinéraire automobile vers Tegidda n'Tesemt et Tahoua.
En 1936, la conférence organisée à Agadez décide que les Kel Ahaggar, les Taitoq et les Kel Ghela qui nomadisent au Niger, au Nord de l'Ighazer, seront rattachés administrativement à Tamanrasset. Il faudra attendre 1945 pour qu'ils soient rattachés au Niger.
Au début de la seconde guerre mondiale en 1939, Jean-Marie Corlu prend le commandement du Groupe méhariste d'Agadez. Le 8 août 1940, il décide de fêter son anniversaire en passant à la "dissidence". Puisque le Niger demeure sous l'obédience de Vichy, il décide de quitter le territoire. Envoyé par son chef vers le nord en reconnaissance de pâturages, il pique vers le sud. A dos de chameau, escorté de deux goumiers, il traverse le désert échappant à toutes les recherches. Toutes les trois heures, les postes de radio du Niger diffusent le même message : par tous les moyens, rechercher et arrêter le lieutenant Corlu, du Groupe Nomade d'Agadès (Carlier 2001). En dix jours, il parcourt 700 kilomètres. Avant de franchir la frontière du Nigeria britannique, il renvoie ses goumiers avec un message à l'attention des officiers d'Agadez, indiquant à ceux qui voudraient le rejoindre la route à suivre. Ce fut sa réponse à l'appel du Général de Gaulle. En septembre, le Lieutenant Pin est à Kirboubou puis In Gall. En 1945, après un stationnement prolongé dans la cuvette de Tegidda n'Tagait, le Sergent-Chef Labelle plante 2 à 300 palmiers dattiers en provenance d'In Gall, il aménagera par ailleurs un abreuvoir pour capter les eaux artésiennes. En 1944, le Goum arrête un marabout maure faisant de la propagande anti-français, Sidi Mahmoud, à Tegidda n'Tagait. Le 24 juin 1945, le Lieutenant Benaud est à Tegidda n'Tagait.
Vers 1945, les Attawari sont retirés au 2è groupe pour former le 8è groupe. Les ineslemen Kel Eghlal, constitués en groupe autonome dès 1918, sont jugés trop néfastes. Il convient, dit le gouverneur Toby, de les combattre de l'intérieur en favorisant le développement de chefferies autonomes (Bernus 1976).
Vers l'indépendance
En 1946, la colonie devient territoire d'outre-mer. En 1947, un administrateur civil est à la tête du cercle d'Agadez, Monsieur Brouin. Robert Marcorelles est le commandant du goum d'Agadez jusqu'en 1953. En mai 1946, les chameaux du groupe nomade dépannent la voiture du Chef de Bataillon Chapelle près de Tchimouménène. Le 10 juin 1947, le groupe nomade est à In Abangarit. Le 5 avril, il est sur Fagoshia avec le Lieutenant Brault. Le 30 mai 1947, le Peloton Méhariste de Tahoua est à In Gall, attendu par le Sergent Thévenin juste arrivé au Niger, le 2 juillet il est à In Kakan, puis Tamaznak pour la Cure salée.
Le 16 novembre 1949, le peloton méhariste stationne 2 mois à Tchimouménène, part pour nomadiser dans l’Azawak avec le Sous-Lieutenant Crétet. Le goumier Mohamed Ag Sajia, qui avait participé au dernier contre-rezzou de 1927, décède à In Gall en 1950 au cours de l'arrestation d'un voleur, il avait 32 ans et sera fait Chevalier de la Légion d'honneur en 1953. En octobre 1950, Ahmed Egrow un Kel Ghela, recherché pour de nombreux délits dont le braconnage d'Addax est dans la région d'In Gall. Il tue le Brigadier-Chef Rousman, un goumier. En février 1952, opération d'arrestation de 40 braconniers Hausa dans le Tadress. L'Adjudant-Chef Marcorelles rencontre Ag El Kheir, chef des Kel Ferwan. Epidémie de variole à la mare de Ekawel, l'année 52 est une bonne année de pluie. Le groupe méhariste participe aux campagnes de vaccination, syphilis, méningite. Le Lieutenant Prautois poursuit Egrow, qui meurt de soif en 1953. Du 3 au 24 novembre 1952, Marcorelles fait le recensement des Kel Ahaggar après être passé par la source de Gélélé.
Le 20 juillet 1955, des travaux de défense consolident le carré de Marandet, à la mi août le Lieutenant Fustec surveille la Cure salée. En juillet 56, une mission de N'Guimi vient y acheter des chameaux.
En septembre 1958, le référendum pour la constitution de la République du Niger a lieu, il devient État membre de la Communauté avec à sa tête Diori Hamani. Fin mai 1956, de nouveau le carré est installé à Marandet, le 3 juillet une tornade comble le puits à cause de l'affolement de vaches peuls. Un chameau est tué par la foudre. En mars 1957, le Lieutenant Carpentier est à Agalel, passe à Azelik puis Fagoshia et Tegidda n'Adrar pour rejoindre Agadez. Juillet 57 retour à Marandet puis surveillance de la Cure salée par le Sous-Lieutenant Dumontet, puis In Kakan, Agalel. Mai 1958, Carpentier retourne sur Marandet est aménage une piste d’atterrissage. Septembre 1958, l’Adjudant-Chef Maupoix est à Marendet. Le 2 novembre Carpentier est à In Gall puis nomadise dans la zone des Kel Fadey. Février 1959, Carpentier et Maupoix se rejoignent à In Abangarit. Le 10 août 1959 installation du carré à In Kakan, surveillance de la Cure salée, puis Tchimouménène, nomadisation puis regroupement à In Abangarit en janvier 1960, pâturage à Tchimouménène puis carré de Sekkiret. Diori Hamani proclame l’dépendance le 3 août 1960. Le 15 novembre, le pâturage du peloton méhariste est à In Gall, le 17 novembre à Tegidda n'Adrar.
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